Dans cet ouvrage au titre emprunté à André Gide puis détourné, Luc Ferry s’emploie à démontrer que la famille, tant décriée de nos jours, ne s’est en fait jamais aussi bien portée. Si on divorce beaucoup depuis la deuxième moitié du vingtième siècle, c’est aussi parce que le mariage de raison a laissé la place au mariage d’amour. Une autre raison, bien sûr, est l’indépendance financière acquise par les femmes. Mais en dépit de ce constat que certains s’escriment à prétendre désastreux, la famille est aujourd’hui plus unie que jamais et surtout, les liens que les différents membres d’une famille tissent entre eux sont infiniment plus sincères que naguère. Autrefois, dans ce bon vieux temps dont on nous rebat les oreilles, la contrainte et l’hypocrisie étaient souvent les piliers des familles. Aujourd’hui, avec la disparition du sens du devoir, de l’abnégation, de l’éternelle reconnaissance, l’amour est roi et décide de nos vies. Quand on n’aime plus son conjoint, on s’en sépare, mais contrairement à une idée reçue, on n’abandonne pas aussi facilement ses enfants qu’au Moyen Âge et encore après, cette époque qui fait rêver un certain nombre de nos concitoyens alors qu’elle est celle de l’obscurantisme, des épidémies, de l’esclavage économique, de l’abêtissement des peuples et de toutes sortes de maux qui anéantissaient les populations dans l’indifférence la plus totale.
Ce désir relativement nouveau de privilégier la vie privée et familiale au détriment de la vie professionnelle a un impact certain sur la vie politique face à la mondialisation à laquelle il semble vain de vouloir échapper. D’ailleurs, faut-il absolument y échapper ?
Luc Ferry s’emploie à nous démontrer que la peur, mauvaise conseillère, nous aveugle et nous coupe les ailes, nous empêchant de nous projeter vers l’avenir. D’où ce réflexe de se retourner vers un passé plus ou moins longtemps qu’on a tendance à idéaliser alors que les êtres humains, qu’on le veuille ou non, n’ont jamais aussi bien vécu qu’aujourd’hui. Car quoi qu’en disent certains, la vieillesse d’aujourd’hui n’a plus rien de commun avec celle d’hier, ni la pauvreté, ni l’accès aux soins et à l’instruction. Regarder en arrière, par crainte de l’avenir, c’est forcément régresser.
Dans un style flamboyant, Luc Ferry nous adresse un brillant essai, parfois un peu ardu mais toujours intéressant. Il ne m’a pas convaincue sur tous les points mais les propos de cet homme de droite ont éveillé en moi une résonnance. Une fois n’est pas coutume !
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