Vocabulaire… avec modération ?

Une amie se plaignait récemment de la tendance de certains auteurs à émailler leurs livres de mots compliqués. Je répondis qu’il n’était pas interdit de consulter un dictionnaire… Je comprends que cela peut être pénible, si cela arrive trop souvent… Mais quand je me trouve dans cette situation, j’ai plutôt tendance à m’insurger contre le puits sans fond de mon ignorance plutôt que contre le vocabulaire riche de l’auteur !
Le nombre de mots dont chaque individu dispose varie justement d’une personne à l’autre et je comprends mal comment on peut accuser autrui de bénéficier d’une quantité de mots supérieure. Car le vocabulaire s’acquiert, il ne tombe pas dans le berceau en même temps que le bébé ! Et si on n’a pas eu la chance de poursuivre des études, nul n’est empêché d’apprendre ultérieurement. Nous connaissons tous des ouvriers aussi cultivés voire davantage que des bureaucrates diplômés.
Tous ceux qui écrivent savent que les vrais synonymes n’existent pas. Chaque mot utilisé comme un synonyme apporte en réalité une précision qui sert le récit. Au lieu d’utiliser le mot « dire » vingt fois dans une page de dialogue, on peut choisir « chuchoter », s’écrier », « s’exclamer », « déclarer », « murmurer », « crier », « marmonner », « expliquer », « énoncer », « répondre », « questionner », « interroger », « relater », « annoncer », « informer », « formuler », « affirmer », « prononcer », « lancer », « indiquer », « signaler », « rapporter », « répéter », et tous ces mots, outre l’avantage d’éviter une vingtaine de répétition, apporteront des nuances intéressantes au récit et à la personnalité des personnages.
Par ailleurs, l’emploi d’un terme exact évite une longue et lourde périphrase. Au lieu d’employer le mot « gargouille » par crainte de ne pas me faire comprendre par mes lecteurs, je pourrais écrire : « Partie saillante d’une gouttière destinée à faire écouler les eaux de pluie à une certaine distance des murs, et qui est souvent ornée d’une figure animale ou humaine généralement monstrueuse. »… « Gargouille », c’est quand même nettement mieux ! On me dira que l’exemple est mal choisi car chacun sait ce qu’est une gargouille. Peut-être… et peut-être pas ! Mais il en va de même pour tous les mots : un mot qui me paraît courant ne le sera pas pour quelqu’un d’autre et inversement.
Alors faut-il renoncer à l’utilisation d’un vocabulaire riche pour ne pas froisser un lecteur moins cultivé ? Je ne le pense pas. Nous avons tous un devoir de nous élever, tirés vers le haut par autrui, et de tirer autrui vers le haut quand nous le pouvons. Il ne faut pas céder à la facilité par complaisance.

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